Qui sommes-nous maintenant, 45 ans plus tard ? Qu'avons-nous vécu pendant toutes ces années, qui nous a transformés, modelés pour nous amener jusqu'à maintenant ?
Moi, après le collège, j'ai continué ma "carrière d'internat" à l'Ecole Normale d'institutrices de Clermont et là non plus ce ne fut pas franchement drôle. Heureusement, là aussi, il y avait les copines et on s'aidait mutuellement à supporter ce système dont la rigidité était de plus en plus dure au fur et à mesure que l'on avançait dans l'adolescence.
Après le bac - et j'ai passé le bac 68, dois-je le préciser ? ce qui fait que longtemps après la rumeur publique continua à penser que, après les événements, notre génération était doublement perdue - après le bac donc, je suis entrée au Centre de formation des professeurs de collège pour apprendre l'enseignement du français, de l'histoire et de la géographie. Ce n'est qu'au début des années 90 que j'ai repris le chemin des études pour me spécialiser en français.
En septembre 71, je me suis donc retrouvée derrière un bureau devant 30 - ou peut-être 35 à l'époque - paires d'yeux qui me dévisageaient en se demandant quelle sorte de prof j'allais être. Le savais-je seulement moi-même ? Cette année-là fut dure, oh si dure ! Je débutais pour tout : le mariage, la maternité, le travail et "l'exil" puisque j'avais été nommée à Saint-Germain des Fossés . Je crois bien que je n'étais pas préparée à tant de charges. Professionnellement, il est tout à fait certain que la formation que j'avais reçue était totalement insuffisante. Il a fallu se débrouiller sur le tas, comme beaucoup de métiers d'ailleurs. Quant au reste, eh bien, le reste ne résista pas non plus au choc. Trois petits tours et puis s'en vont..... Je revins à la "capitale" 3 petites années plus tard avec ma "puce" de 2 ans et demi et je me retrouvai au collège de Cunlhat. Et là, j'ai eu besoin de la carte routière pour savoir où dénicher ce village ! Je n'en avais jamais entendu parler. . Moi qui croyais me rapprocher de Clermont, j'étais bien servie. Cunlhat, en plein coeur du pays de Gaspard des Montagnes, était difficile d'accès et les hivers y étaient largement aussi froids et aussi longs que les hivers gellois, je peux vous l'affirmer. Mais la nature et les paysages m'ont largement récompensée de cet éloignement et je me souviens avec plaisir de ces hivers neigeux même si les conditions de déplacement étaient rendues difficiles.
2 ans et un nouveau compagnon plus tard, je me suis retrouvée à Thiers où j'ai passé une dizaine d'années riches à bien des égards. Cette stabilité géographique m'a permis d'y apprendre véritablement ce métier de prof que j'avais choisi, que je ne connaissais pas encore vraiment et dont jai découvert toutes les richesses avec des élèves dont je me souviens toujours avec tendresse. C'est en fait un métier que l'on réapprend un peu chaque année avec les nouvelles têtes que l'on a en face de soi.
Au milieu des années 80, j'ai quitté l'enclave thiernoise pour la capitale et tous ceux qui connaissent Thiers et sa région ou qui y ont vécu savent combien le mot "enclave" convient particulièrement à ce petit coin auvergnat. Mon mari étant mort dans un accident de voiture, j'ai dû vendre ma maison et je me suis rapprochée de ma famille.
J'ai reconstruit une vie familiale, ai eu un deuxième enfant - un garçon de 22 ans maintenant - et suis restée 15 ans au collège de Chamalières.
Encore 3 ans consacrés à l'intégration des enfants aveugles et mal-voyants dans le collège ordinaire comme on dit à l'Education Nationale - j'ai même appris le braille mais j'ai oublié depuis - 2 ans au collège de Cournon et je me suis retrouvée aux abords de la retraite.
C'était une nouvelle étape, une nouvelle vie qui commençait. C'est une histoire de maintenant qui me laisse beaucoup de temps pour ma famille et les loisirs ; et c'est grâce à ce temps libre que renouer avec toutes ces amitiés d'enfance et d'adolescence que l'on croyait perdues, enfouies sous les pages du passé est devenu possible.
Et nous sommes bien partis pour découvrir qui se cache derrière les visages des photos que les uns ou les autres ont conservées et fait ressurgir de leurs albums ou de leurs cartons cachés dans les greniers. C'est bientôt, le 13 septembre ! Dans 6 semaines, très exactement...
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